Fue muy repentino. Advertí un progreso asombroso de mi inteligencia.
Cuestiones atinentes tanto a la condición humana en general como al
secreto de mi propia persona, y que hasta ese día ni por sombra había
podido dilucidar, se esclarecieron de golpe. De golpe, accedí a una
comprensión superior.
Sin embargo, yo no había introducido cambio alguno en la conducta de
mi existencia. No estaba sacando in fine provecho de un largo y
paciente estudio. Y nada veía tampoco que pudiese relacionarse con las
vicisitudes de mi vida. Muchos sostienen que ciertas adversidades
producen efectos fulminantes sobre nuestra natural complexión, que se
rasga un velo, que revelaciones íntimas se producen.
Pero últimamente no me había sido tan contraria la fortuna; aunque
tampoco me tocara guitarra, ni bien cumplido ni mal acabado, un año sin
duelo ni nacimiento. No hubo cómo le pudiese atribuir causa determinada a
ese súbito incremento de lucidez, de sagacidad, de capacidad. Pero el
hecho no admitía discusión: comprendía cuanto se sustraía antes a mi
entendimiento. Dotado de una penetración filosófica inédita, desentrañé
también el espeso enigma matemático. A su vez, mi soltura en esa ciencia
me franqueó el acceso a las metafísicas más abstractas, y las más
abstrusas.
Mi comportamiento cambió. Desde entonces había de pasarme casi todo
el santo día durmiendo. Curiosamente, esa letargia no perjudicó mi
condición física. Antes bien, me descubrí, además, un portento de
agilidad cuando muy ocasionalmente me decidía a introducir un poco de
acción en mi vida. Y así, de un salto franqueaba el muro de cerca de mi
jardín. Caminaba sin miedo por la cumbrera de los tejados más empinados.
Me trepaba a los árboles sin experimentar más aquel vértigo que solía
paralizarme.
Pero sólo era cosa de esparcir el ánimo, ya no me movía sino para
mi solaz y entretenimiento. Y eso porque desde el día en que mis
capacidades intelectuales aumentaron tan ostensiblemente, ya no tuve
necesidad de trabajar más para ganarme la vida. Me libré de los desvelos
de la cotidiana tarea, de la afanosa labranza. Con holganza sola se
ponía la olla. Ni que se hubiera vuelto mi luciente y distintivo genio
una evidencia para todo el mundo, fui dispensado de la obligación de
participar en los trabajos de la comunidad, y consiguientemente quedé
exento de impuestos.
Me sustentan. Por lo menos dos veces al día, deponen ante mí un
copioso plato de comida. Ya no tengo que pescar o cosecharme el
almuerzo, y si aún salgo a darle caza de vez en cuando, es por
diversión, para darme el gusto, luciendo yo sin embargo mucha más
habilidad y precisión que antes, y sin el auxilio de mi galgo, más
confundido que perro en misa, y, además de eso, bien mal hallado por mi
desafición. Desde entonces se muestra muy agresivo conmigo. Me voy a
tener que separar de él. Se lo doy a quienquier… ¿alguien lo quiere?
La voluptuosidad ha dejado de faltarle a mi deseo. Las caricias que
huían de mí cual espantadizos pájaros vienen por sí solas a mi
encuentro. Largos y finísimos dedos de uñas pintadas me regalan la
panza. Puedo, sin temer la bofetada que asentadamente castigara
semejante atrevimiento, enredarme entre las piernas de las mujeres más
bellas, y hasta deslizarme debajo de sus faldas. Ya no se enfaldan.
Así, la inteligencia que por voluntad divina se posó sobre mi frente
me hizo merecedor de incontables ventajas, atenciones, y condignas
ofrendas. Heme doblemente feliz y privilegiado pues la inteligencia, por
lo que yo siempre catara, por lo que muy de tarde en tarde a mí me
tocara, me parecía harto desconsiderada: era humillada, atropellada,
denigrada. La mía, por lo contrario, es objeto de una suerte de culto
del que disfruto muy prosaicamente, y sin pecar de cínico, tenedlo por
seguro, mas sin avergonzarme, y menos compungirme.
Bien mirado, lo que abunda no daña y es de bien nacidos ser
agradecidos. Esa prodigiosa comprensión de los seres y de las cosas me
permite gobernarme con más aplomo y mayor serenidad, eso es todo. Y el
sistema que antes me oprimía ahora me beneficia. Obra en mi pro.
Terminé por darme cuenta que no soy solo en mi género. Somos unos
cuantos en haber recibido ese don de inteligencia. Formamos una
comunidad imprecisa, sin sociedad, sin ritos, sin religión, sin
estatutos. No obstante nos reconocemos en seguida entre nosotros. A
veces la noche nos junta. De día, no alternamos mucho. Para que no nos
descubran, guardamos las distancias. Procuramos no llamar la atención.
Nos envidiarían. Y quién sabe si no nos hostigarían. Entonces rondamos
entornando los ojillos. Nos rozamos. Y cada uno parte por su lado.
Luego se acurruca en la canastita, sobre la almohadilla, y casi a un tiempo ronronea.
Éric Chevillard, Nítidos progresos
Traducción: Corinne Ferrero
¨NETS PROGRÈS¨ de Eric Chevillard
Ce fut très soudain. Je constatai un étonnant progrès de mon
intelligence. Des questions touchant aussi bien à la condition humaine
en général qu’au secret de ma propre personne et qui m’étaient demeurées
très opaques jusqu’à ce jour s’éclaircirent d’un coup. D’un coup,
j’accédai à une compréhension supérieure.
Pourtant, je n’avais rien changé à la conduite de ma vie. Je ne tirais
pas in fine le profit d’une longue et patiente étude. Rien non plus qui
se puisse rapporter aux événements de mon existence. On prétend que
certaines épreuves ont des effets foudroyants sur notre complexion
particulière, qu’un voile se déchire, que des révélations intimes se
produisent.
Mais j’avais été plutôt épargné par le sort ces derniers temps ; aucune
grande joie non plus à signaler ; une année sans deuil ni naissance. Je
ne pus attribuer à nulle cause précise ce surcroît subit de lucidité, de
sagacité, de capacité. Mais cela était indéniable : je comprenais ce
qui autrefois se dérobait à mon entendement. Doué d’une pénétration
philosophique nouvelle, je perçai aussi grâce à elle l’épaisse énigme
mathématique. Et ma maîtrise dans cette dernière science me donna à son
tour accès aux métaphysiques les plus abstraites, les plus abstruses.
Mon comportement changea. Je passai désormais le plus clair de mes
journées à dormir. Curieusement, cette léthargie ne nuisit pas à ma
condition physique. Bien au contraire, je me découvris aussi une agilité
nouvelle aux rares moments où je décidais de mettre un peu d’action
dans ma vie. Alors, d’un bond, je franchissais le mur d’enceinte de mon
jardin. Je marchais sans peur sur le faîte des toits. Je grimpais aux
arbres sans plus éprouver le vertige qui me paralysait jadis.
Mais je ne bougeais que pour me donner de l’amusement et de la
distraction. Car, du jour où mes capacités intellectuelles augmentèrent
de façon si flagrante, il ne me fut plus nécessaire de travailler pour
gagner ma vie. Finie, la corvée quotidienne, le rude labeur alimentaire.
Je rendis mon tablier. Comme si le génie qui me distinguait était une
évidence pour tout le monde, je fus dispensé de prendre part aux travaux
de la communauté et corollairement de payer des impôts.
On me nourrit. Deux fois par jour au moins, une assiette copieuse est
déposée devant moi. Je n’ai plus à pêcher ni à moissonner mon déjeuner,
et si je le chasse encore parfois, c’est par jeu, pour mon seul plaisir,
avec pourtant plus d’habileté et de précision que par le passé, sans le
renfort de mon chien devenu inutile et, d’ailleurs, bien marri de ma
désaffection. Il se montre depuis très agressif envers moi. Je vais
devoir me séparer de lui. Je le donne, si quelqu’un le veut ?
La volupté ne se dérobe plus à mon désir. Les caresses qui me fuyaient
comme des oiseaux farouches viennent d’elles-mêmes à ma rencontre. De
longs doigts fins aux ongles vernis me grattent le ventre. Je peux, sans
craindre la gifle qui souvent autrefois avait puni de semblables
audaces, me frotter contre les jambes des plus belles femmes et même me
couler sous leurs jupes. Elles ne se froissent plus.
Ainsi, l’intelligence qui s’est posée sur mon front comme une faveur
divine me vaut bien des avantages, des attentions, des offrandes. Je me
trouve doublement heureux et privilégié car l’intelligence, pour ce que
j’en savais auparavant, pour ce que j’en avais peut-être, me paraissait
plutôt mal considérée : on l’humiliait, on la bafouait, on la méprisait.
La mienne, au contraire, fait l’objet d’une sorte de culte dont je
jouis aussi très prosaïquement, sans aucun cynisme, notez-le bien, mais
sans honte ni remords non plus.
Je n’ai pas volé ces récompenses, en somme. La compréhension prodigieuse
des êtres et des choses dont je suis doué me permet de me diriger avec
plus d’aisance et de sûreté, voilà tout. Et le système qui m’opprimait
autrefois me profite à présent. Il joue pour moi.
J’ai fini par me rendre compte que je ne suis pas seul dans mon cas.
Nous sommes quelques-uns à avoir reçu ce don d’intelligence. Nous
formons une vague communauté, sans société, sans rites, sans religion,
sans statuts. Il n’en reste pas moins que nous nous reconnaissons tout
de suite entre nous. La nuit parfois nous rassemble. Le jour, nous ne
frayons guère. Afin de ne pas nous trahir, nous gardons nos distances.
Mieux vaut rester discrets. On nous jalouserait. On nous rudoierait
peut-être. Alors nous nous contentons de plisser les yeux. Nous nous
frôlons. Et chacun part de son côté.
Puis va se lover dans son panier, sur son coussin, et presque aussitôt ronronne.
Eric Chevillard
Paris, EdM, Abril 2015